L’un des obstacles que nous rencontrons sur le chemin de la conscience profonde résulte du discours incessant de la pensée. Tous les méditants le savent.
Le monde occidental entretient cet obstacle en tenant en haute estime la pensée même, par rapport à d’autres modes ou niveaux de fonctionnement (émotions, sensations, intuitions,…).
Il est souvent affirmé que la pensée permet une approche « cartésienne » et donc nécessairement d’un degré supérieur aux autres. Or, la formule attribuée à Descartes, « Je pense donc je suis », constitue a priori l’antithèse de la pleine conscience.
« Je pense, donc je ne suis pas ici et maintenant » disent plutôt les bouddhistes. Et donc: « Je ne pense pas, donc je suis ».
Rappelons-nous toutefois que
… que l’expression « cogito ergo sum » ne se réfère pas seulement à la « raison » au sens strict, comme mécanisme de réflexion …
… que l’idée maîtresse qui repose derrière l’intuition de Descartes, sans doute insuffisamment exprimée par cette formule, consiste à affirmer que la connaissance de l’homme se fonde sur la conscience qu’il a de lui-même…
… que Saint-Augustin à Sainte-Thérèse d’Avila, notamment, avait déjà exprimé cette intuition avant Descartes…
Dans ses Méditations (tiens, tiens…), Descartes écrit:
« Après y avoir bien pensé, et avoir soigneusement examiné toutes choses, enfin il faut conclure, et tenir pour constant que cette proposition : Je suis, j’existe, est nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce, ou que je la conçois en mon esprit. »
Il fait de cette vérité à la fois l’aboutissement d’un effort de pensée quant à l’essence-même de la connaissance vraie et la pierre angulaire de sa pensée.
En définitive, Descartes, qui n’était certes pas bouddhiste, n’exprime-t-il une vérité de pleine conscience: « J’existe à chaque fois que je prends conscience que jexiste… »?
A méditer…